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Vers le développement durable - ODD 16 : Renforcer la cohésion sociale pour promouvoir la paix et la démocratie au Burundi

  1. Créé par Lawrence PIETERS
  2. Le 22/03/2021
  3. Dans ODD
A l’occasion du 5ème anniversaire des Objectifs de développement durable (ODD), nous partageons des initiatives d’OSC qui contribuent de manière efficace et innovante à la réalisation de ces objectifs. Cette semaine, l’ODD 16 : Paix, justice et institutions efficaces.

Alors que certaines régions profitent durablement de la paix, de la sécurité et de la prospérité, d’autres sont entraînées dans un cycle de conflits et de violence qui semble sans fin. Des niveaux élevés d’insécurité qui ont un effet destructeur sur le développement d’un pays, en entravant la croissance économique et en engendrant souvent des souffrances durables au sein de la population, qui peuvent persister pendant des générations.

L’ODD 16 vise à réduire largement toutes les formes de violence, et à œuvrer aux côtés des gouvernements et des communautés afin de trouver des solutions durables aux conflits et à l’insécurité. La paix, la stabilité, les droits humains et une gouvernance efficace fondée sur l’état de droit sont en effet des vecteurs essentiels pour le développement durable.

Au Burundi, un pays durement touché par l’instabilité politique, l’insécurité et les violences communautaires résultant de décennies de conflits dans la région des Grands Lacs, l’organisation belge Commission Justice et Paix s’appuie sur ces trois piliers de la paix, de la justice et de la gouvernance pour renforcer la cohésion sociale au sein et entre les communautés. Elle travaille pour cela en étroite collaboration avec la Commission Episcopale Justice et Paix (CEJP) burundaise. « Notre relation est en effet très étroite ! », raconte Alejandra Mejia Cardona, responsable prévention des conflits et Afrique centrale au sein de la Commission Justice et Paix. « Nos partenaires mettent en œuvre le projet sur le terrain, avec leur grande expérience et leur connaissance des spécificités de chaque communauté. De notre côté, nous apportons un soutien dans le suivi du projet, dans le renforcement de leurs capacités et dans la communication avec d’autres partenaires nationaux ou régionaux. Nous contribuons aussi à faire connaître le projet en Belgique, en organisant des rencontres entre nos partenaires et des élus belges ou européens, par exemple ».

« La première étape est de travailler sur la mémoire, comprendre l’histoire telle qu’elle a été vécue par les différents acteurs des conflits, afin d’établir un espace de dialogue »

Pour contribuer à la prévention des conflits et donc à l’instauration d’une paix durable, « la première étape est de travailler sur la mémoire, comprendre l’histoire telle qu’elle a été vécue par les différents acteurs des conflits, afin d’établir un espace de dialogue », explique Alejandra. « Tout est fondé sur le dialogue comme alternative à la violence pour résoudre les problèmes ».

Des réunions communautaires, commémorations, ou groupes de parole sont ainsi mis en place pour offrir un espace aux victimes, témoins et acteurs belligérants pour raconter leur histoire et affronter leurs traumatismes. Des rencontres sont par exemple organisées dans les églises locales à la mémoire des personnes disparues. « Lors de ces rencontres, tout le monde peut s’exprimer et offrir son témoignage sur les personnes disparues. La parole est libérée et les témoignages peuvent apporter des informations nouvelles et même révéler le sort de certain·e·s disparu·e·s ».

Ce travail de cohésion sociale et de lutte contre les préjugés n’oublie pas ceux et celles qui sont l’avenir du pays. Au sein de clubs scolaires, animés soit par un·e enseignant·e de l’école, soit par une personne spécialement formée à ce dessein, les jeunes sont sensibilisés aux principes d’une cohésion sociale respectueuse, tolérante, pacifique et solidaire. L’objectif ? Former une nouvelle génération attachée au vivre ensemble et au respect de l’autre, au-delà de toute identité ethnique, religieuse ou affiliation politique. Environ 2000 élèves ont déjà été touchés par le projet. Pour Alejandra, « l’impact des clubs scolaires se manifeste, par exemple, au travers des changements de comportements des jeunes. Ils se montrent plus empathiques à l’égard de leurs semblables, ils sont plus conscients de leur rôle au sein des écoles et de leurs communautés. Ils sont plus responsables et développent une approche collective dans toutes les activités ».

La CEJP est traditionnellement très active dans la promotion de la culture du droit et de l’accès à la justice. Comme le dialogue, la justice représente en effet une alternative à la violence pour la résolution des conflits. « C’est pourquoi il est essentiel de renforcer la confiance dans le système judiciaire, mais aussi de favoriser l’accès à la justice des personnes les plus vulnérables » . La CEJP met ainsi à disposition des communautés des médiateurs qui permettent de désamorcer des conflits naissants, ainsi que des para-juristes qui vont favoriser la connaissance par les citoyens de leurs droits civiques.

« Il est essentiel de renforcer la confiance dans le système judiciaire, mais aussi de favoriser l’accès à la justice des personnes les plus vulnérables »

Au-delà de la justice, c’est toute la confiance dans le système démocratique qui a besoin d’être restaurée. C’est le troisième pilier de la démarche de la Commission Justice et Paix : favoriser la gouvernance participative et l’implication citoyenne dans la gestion des affaires publiques, notamment à travers la création de Comités locaux de gouvernance participative (CLGP). Ces comités ont un double rôle. « D’un côté, ils jouent un rôle de médiateurs entre les communautés et l’administration locale, mais ils sont totalement indépendants par rapport à cette dernière », souligne Alejandra. « De l’autre, ils font un travail de sensibilisation auprès de la population sur des sujets comme la tolérance, la lutte contre les préjugés ethniques, la solution pacifique des conflits, la citoyenneté… ». Le travail des CLGP cherche à éliminer les biais communautaires et à encourager le vote basé sur un programme, et non sur l’attachement communautaire. « Le but est que les personnes se reconnaissent en tant que citoyen·ne·s et pas seulement en tant que membres d’une communauté ».

Les membres des CLGP sont choisis en fonction de leur profil : ils doivent être dignes de représenter l’ensemble de leur communauté, et faire preuve d’honnêteté, de solidarité et d’écoute. Les CLGP respectent également une stricte parité homme-femme. « Les femmes sont souvent exclues des processus décisionnels au sein de leur communauté, alors que malheureusement, elles sont souvent les premières personnes à payer les frais des conflits armés, de l’impunité et de l’absence des droits les plus élémentaires ». Leur participation aux CLGP  permet de les renforcer en tant que citoyennes à part entière.

Les résultats positifs engrangés par ce projet - initié il y a 3 ans seulement – permettent à le Commission Justice & Paix d’envisager d’étendre sa stratégie de prévention des conflits au niveau de toute la région des Grands Lacs. Une stratégie, déployée de manière conjointe avec des partenaires locaux (CEJP-Burundi, CDJP-RDC et la CEJP-Rwanda), qui devrait permettre à ces partenaires de se renforcer mutuellement, selon leurs compétences spécifiques et leurs expériences. Pour Alejandra, « c’est un projet ambitieux, de longue haleine, mais nous sommes convaincu·e·s que le changement est possible, car nos partenaires sont déterminés ! »

Plus d’infos : https://www.justicepaix.be/-Burundi-  

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